mercredi 6 décembre 2017

1967 À DIJON : PARDONNE-MOI JOHNNY ...

(Photo Michel Huvet)


Tout jeune débutant dans le journalisme et la critique musicale (classique), je me suis retrouvé confronté à Johnny Hallyday un soir de 1967 au théâtre de Dijon. J'ai raconté cela dans mes Souvenirs d'un pisseur d'encre. Voici ce récit...


Mon rédacteur en chef, en ces temps lointains où un rédacteur en chef ignorait encore ce que pouvaient signifier rock ou pop music, avait cru bon, un soir de 1967, de m’envoyer assister à un « récital » du nommé Hallyday, prénom Johnny, dont les gazettes avaient déjà fait une idole en ces années où elles finirent pourtant toutes par tomber. J’étais, si je me rappelle bien, dans les coulisses à côté de la bête, bardé d’un énorme « 6/6 » affublé lui-même d’un flash digne des films de Renoir, lui-même relié par un fil noir en accordéon à une énorme batterie qui pendait le long de mon épaule. La bête ânonnait des complaintes si bruyantes que mes connaissances mozartiennes ne m’étaient guère utiles en la circonstance et je la vis jeter soudain une chemise – plus serpillière que liquette d’ailleurs – à la foule de jeunes égéries dépoitraillées qui délirait sur les fauteuils et au balcon d’un vieux théâtre à l’italienne qui n’avait évidemment pas été conçu pour cela.

Une page d'insultes !  

Dans le journal, je racontai cela sans ambages. L’idole, qui avait sommeillé à l’Hôtel de la Cloche, alors le nec plus ultra de l’hôtellerie dijonnaise, appela le Journal qui avait lors pignon sur place presque en face, et promit de venir illico me faire ma fête. Je n’en menai pas large, je l’avoue, à peine rassuré par les braves ouvriers du Livre qui, au rez-de-chaussée, avaient préparé des barres de plomb pour fortifier mes défenses. Et le Journal fut, dès le lendemain, assailli de lettres féroces, analphabètes et sans nuances, qui me vouaient aux gémonies : « Si ça se trouve, m’écrivait ainsi un yéyé, tu es bâti comme une bouteille de Sylvaner et tu n’oserais pas l’enlever, toi, ta chemise, ah, ah ! » Bref : Le Bien Public, sous la pression populaire, fut contraint de publier, dans la semaine qui suivit, deux pleines pages de « lettres de lecteurs », la page de gauche me condamnant à mort, la page de droite me louant d’avoir osé dire tout haut que cette « musique de sauvage » n’avait rien à voir avec de la musique. J’en sortis penaud, fâché avec une sœur hallidayenne, mais auréolé d’une gloire populaire qui mit deux générations à décroître !

jeudi 23 novembre 2017

JEAN LIBIS : LÉNINE ... TROISIÈME VIOLON !


 
Jean Libis (Photo Babelio)
Lénine à l’académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon, on aura tout vu ! Et pourtant si : grâce au philosophe et écrivain Jean Libis, le centenaire de la révolution de 1917, dont Lénine a été le propulseur, a été commémoré dans l’apprente vieille institution dijonnaise, celle qui couronna Rousseau !

Le sujet traité par Jean Libis – Est-il légitime de parler d’une philosophie de Lénine? – avait attiré un grand nombre de curieux, académiciens ou pas, philosophes ou scientifiques, curieux ou amis du communicant – y compris quelque prétentieux qui n’admet pas qu’on évoque un sujet qu’il se croit seul à connaître.

"Transformer le monde"

En tout cas, Jean Libis a livré une réflexion précise, argumentée, pour aboutir en gros à nous faire comprendre que la philosophie de Lénine est difficilement compatible avec l’intemporalité d’une philosophie véritable : "Oui, il y a bien une philosophie de Lénine mais c’est une philosophie pauvre, disons limitée dans le sillage de Marx, corrélative d’une logique violente un peu incompatible et qui risque d’évoluer en fonction des circonstances et donc risque de s’autodétruire".

Derrière Marx et Engels, qu’il a longuement expliqué, Jean Libis place donc Lénine en "troisième violon" de cet orchestre matérialiste et dialectique dont la partitiion est essentiellement pratique puisqu’il s’agit de "transformer le monde".

Evidemment, énoncer tout cela aujourd’hui, alors que nous avons le recul et la connaissance de l’aventure marxiste-léniniste, peut paraître facile, à l’instar de cette affirmation de François Furet que Jean libis avait placé quasiment en exergue de sa communication : "Le passé d’une illusion".

Pour ma part, je retiens que cette belle idée dialectique a échoué pour la seule raison qu’elle a considéré l’humanité comme une seule réalité, au mépris des humains qui la composent.

Michel HUVET

vendredi 27 octobre 2017

LES "MÉFAITS DU TABAC" À SEMUR : IVAN IVANOVITCH, C'EST AUSSI NOUS !


Alain Bouchet en Ivan Ivanovitch (photo Philippe Blanc)

Tout habitué de la chose théâtrale sait ce que les Méfaits du tabac (Tchékov) ont produit comme écoeurements divers : une farce bonne à être jouée par des amateurs de patronage… Un petit tour dans la très improbable salle de l’ancien tribunal semurois et tout a changé d’un seul coup de la baguette magique agitée par trois compères chevronnés, le « clown » Alain Bouchet, le musicien Gérard Pichon et le metteur en scène Philippe Berling.

Sans possibilité de jeux de lumières, rien qu’avec l’utilisation subtile des lieux, sans rideaux ni décors, rien qu’avec le jeu des acteurs, voilà que Tchékov s’est mis à nous parler comme un auteur du XXI° siècle, Alain Bouchet se défaisant au fil du monologue des masques de Buster Keaton ou de Charlie Chaplin (celui du Kid) et Gérard Pichon se délaissant du travesti pour dire, avec son piano et sa perruque, toute la pesanteur symbolique, ici d’une femme rigide et austère, prof de musique et rectrice de pensionnat, qui pourrait tout aussi bien être un pouvoir politique, tout ce dont le « conférencier du tabac » a sur le cœur.

 La farce se fait psychodrame

Alors voilà que la farce se fait psychodrame. Le jeu, la mise en scène, la chorégraphie – oui, ce ballet incroyable entre Ivan Ivanovitch et une mouche est d’une symbolique atrocement révélatrice – se conjuguent pour nous offrir un miroir de tous nos refoulements. Ivan, c’est aussi nous. Et quand le crescendo d’accords pianistiques et de confessions inconscientes est à son terme, Ivan va littéralement exploser – c’est ça, toujours, avec Tchékov, demandez donc à l’Oncle Vania – et nous faire nous aussi expectorer ces non-dits comme pour une libération bienfaisante.

Il n’y a donc que le théâtre, ici exprimé sans une apparente simplicité scénique, pour parvenir à tant d’émotion. Philippe Berling, sournoisement, sans qu’on ait l’impression qu’il y a mis plus qu’un peu de savoir scénique, a trouvé le chemin qui va de l’acteur au spectateur, et y retourne sans doute, pour le bien de tous. Tchékov est comblé. Nous aussi.

Michel HUVET

dimanche 17 septembre 2017

CHÂTILLON-SUR-SEINE : ÉPOUSTOUFLANTE OUVERTURE DE SAISON AU THÉÂTRE


L'heureux retour de Kiki dans sa ville natale
  
Bluffés, sidérés, enchantés, ravis, émus : on ne sait quel adjectif utiliser pour qualifier au mieux les sentiments qui animaient les spectateurs vendredi dernier au sortir d’une soirée d’ouverture de saison au théâtre Gaston-Bernard de Châtillon-sur-Seine. Même le maire de la ville, Hubert Brigand, ne cachait pas son émotion en remettant des fleurs à Milena Marinelli qui venait de faire revivre, avec quel talent, cette Kiki de Montparnasse qui n’avait jamais oublié sa ville natale de … Châtillon-sur-Seine.

La première saison de Catherine Miraton  

Mais avant que le spectacle d’Hervé Devolder ne transporte le public vers un enthousiasme assez rare, la nouvelle directrice du théâtre, Catherine Miraton, avait présenté une saison variée, de haute qualité, où la danse, la musique et le théâtre s’entremêlent en spectacles hors les murs et au théâtre même, avec compagnies en résidence et ateliers pour les enfants, tout un monde de découvertes à faire et dont  la directrice passionnée est parvenue à susciter la curiosité et l’envie.

Catherine Miraton et Hervé Devolder lors de la présentation de la saison (Photo FL)
Grâce à des extraits des spectacles diffusés en vidéo sur écran géant, et avec les commentaires avisés et incitatifs de Catherine Miraton, on s’est ainsi promené d’une vision saltimbanque de Ruy Blas à un écho tumultueux de la Vieille qui lançait des couteaux, voire d’un tourbillon de délires façon Marianne James en aperçus éblouissants de danse contemporaine très acrobatique. On aura même de quoi goûter les beautés ramistes de Didon et Énée avec les présentations drôlatiques des deux compères comiques de Kamelott !

Le rayonnement châtillonnais

Et puis il y eut Hervé Devolder et sa production nominée aux Molières 2016 : "Les Châtillonnais se rendent-ils compte de la chance qu’ils ont d’avoir pareil théâtre et pareil programme ?" a-t-il dit avant de plonger la salle dans l’enchantement de cette Kiki littéralement ressuscitée et nous donner une image réelle, véridique, de cette incroyable jeune femme des années folles devenue la muse des plus grands artistes et qui n’oublia jamais sa chère grand-mère châtillonnaise.

Les spectateurs, venus si nombreux de bien des horizons, sont repartis émerveillés avec la brochure de saison à la main. Et Catherine Miraton peut s’attendre à un trop-plein d’abonnements pour ce théâtre et cette ville où l’on vient de Côte-d’Or, de Haute-Marne, de l’Aube ou de l’Yonne. Châtillon ville libre ?

Michel HUVET



mercredi 30 août 2017

CÔTE-D'OR : POLITIQUE FAÇON PUZZLE


(Photo X)
Depuis la tornade du printemps – et les dégâts inattendus, phénoménaux, psychologiques surtout –, plus rien ne va dans le monde politique. D’abord, cette tornade a permis à tous de comprendre que les politiques d’ancien régime ne servaient plus à rien (sauf à engranger des subsides) et n’avaient plus de réel pouvoir, notamment économique. Ces gens-là avaient simplement oublié que leur pouvoir n’existait que par l’argent des contribuables ce que, présidents de département ou maires, ils avaient apparemment oublié.

Donc les voilà balayés et, du coup, hébétés. Voyez ici ou là comme ils semblent n’avoir rien compris : on les voit tenter de recommencer à nouer des alliances devenues impossibles, à critiquer des mesures qu’ils étaient les premiers à réclamer du temps de leur petit pouvoir : ils sont pathétiques. Et ceux qui avaient tout compris, n’avaient rien à se reprocher et que la tornade à empêchés d’être enfin élus – on peut citer, en Côte-d’Or, François-Xavier Dugourd ou Hubert Brigand (1) pour la droite, Anne Dillenseger ou Sladana Sivkovic pour la gauche – sont d’autant plus déconfits de retrouver, à leur place, des collègues élus sur les mêmes listes qu’eux (dans leur mairie ou de leur conseil départemental) et qui sont devenus députés comme on gagne au loto.

Le pire dans tout ce marasme, c’est de voir s’installer une confusion des genres dramatique, de voir d’anciens ministres devenir journalistes-éditorialistes et de pseudo-journalistes porter la parole de nouveaux grands élus. La déontologie journalistique, déjà mise à mal depuis si longtemps, est morte sous les coups de la “com” et de l’ambition, de la malhonnêteté et du “ménage” à tout va.

Après cette tornade qui a tout déchiré façon puzzle, il est vraiment temps de retrouver le sens de vraies valeurs déontologiques et républicaines.

Michel HUVET

mardi 1 août 2017

BUTTE DE THIL : LA VRAIE NUIT DES ÉTOILES !


Coucher de soleil sur la butte de Thil

Plus belle que jamais, toute habillée d’oeuvres de bois et de tissus rares aux couleurs damassées, la collégiale de Thil a une fois encore ébloui les nombreux mélomanes pique-niqueurs qui ne manqueraient pour rien au monde les deux concerts de cette incroyable nuit des étoiles.

Pour la 9° fois, l’académie de Thil, si chère au coeur d’Anne-Marie Blanzat, a clos ses ateliers par ces deux concerts d’auditions de fin de stage : un régal pour ceux qui savent qu’ici, avec les amis de Vic-sous-Thil et son maire cinéaste, on a bien mieux et pour moins cher qu’à Orange ou à Saint-Céré ! 



Morgane, Louise et Emmanuelle 

Avec Bruce Grant comme chef des études musicales et Lucile Steunou comme chef de chant au doigté pianistique émouvant, on est certain de tutoyer les cîmes. Il y a de la perfection dans l’air, et Morgane Paquette, à cet égard, défie tous les possibles en se jouant des invraisemblables acrobaties coloraturesques proposées par Haydn dans  Il mondo della luna, en maniant l’humour au troisième degré des Je t’aime d’Ivan Aboulker et en émouvant la salle entière avec la Nuit si belle d’Ernest Chausson.

Autres étoiles de cette nuit dans la collégiale, la soprano lyrique Louise de la Celle et la mezzo Emmanuelle Chavaz qu’on avait déjà entendu ici mais qui, cette année, ont atteint les sommets dont elles rêvaient, la première dans l’air d’Elisabetta de Verdi (et dans le magnifique duo du Requiem du même Verdi qu’elle a chanté avec Emmanuelle), la seconde dans le merveilleux et nostalgique Temps des lilas de Chausson.

 Dix ans en 2018 !

On n’aurait garde d’oublier les joies qu’ont procuré aux auditeurs la soprano léger Delphine Vasset – une sacrée découverte, surtout dans la bien nommée Nuit d’étoiles de Debussy –, la soprano lyrique Myrtille Cayot (air de Siebel de Gounod), la soprano Joëlle Convert (Vivaldi et Haendel), la mezzo Marijke Cuin (Schubert) et la soprano Samira Hanchi (Cesti). Regrets, enfin, de n’avoir pu entendre la mezzo Véronique Repplinger que dans des duos (souffrante, elle n’a pu assurer ses solis)…

Anne-Marie Blanzat et ses amis de Vic préparent déjà le dixième anniversaire (2018) de cette académie de Thil et l’on est déjà certain qu’une sacrée belle nuit des étoiles nous y attend !


Michel HUVET

mardi 20 juin 2017

J'AI RENCONTRÉ LA VIEILLE QUI LANÇAIT DES COUTEAUX


 
(Photos Amaranta)
Tout là-haut, sur la butte de la Charme, à Gemeaux, on pélerine pour arriver à la roulotte d’Amaranta. Puis on est invité à pénétrer, via la roulotte, dans l’arène, le cirque, le théâtre de la vie bohémienne, comme une initiation à la vie manouche. Le Fils vermoulu et perclus de rhumatismes vous invite, la bouche tordue, à prendre place sur les gradins. Alors on se laisse vivre, au sens où disparaît toute raison et où l’existence seule a droit de cité.


Hanna, la petite-fille de la Vieille, est là, enceinte de six mois, et elle tournoie sur la piste, ses grands yeux tristes accompagnant les complaintes manouches nostalgiques qu’elle laisse s’échapper de son accordéon. Et lui, le Fils, bafouille ses tourments, remue ses souvenirs, annonce que le spectacle circasien va advenir, nous accompagne dans la vérité des camps-volants, raconte sa vie, celle de sa mère campagnarde, celle de son père le gitan au beau gilet jamais fermé, et sans cesse nous annonce que, peut-être, elle va venir, la Vieille, lancer ses couteaux, fourchettes et autres ustensiles pointus, parce qu’il faut bien vivre et recueillir quelques pièces dans la gamelle.

Dans la roulotte, Hanna, puis le Fils, supplient la Vieille de bien vouloir venir. Elle ne viendra pas tant qu’elle n’aura pas murmuré un Notre-Père, retrouvé un canne improbable pour tenir ses jambes flageolantes. L’accordéon l’appelle en longs accords graves. Et elle arrive, dans un silence où c’est tout le monde manouche qui se résume, et elle va nous en raconter, nous prendre à témoin de sa vie, de ses amours, de sa vie avec lui, le Père, dont l’effigie trône dans un coin car elle ne saurait lui parler, ou lancer des couteaux, sans qu’il soit là.

Et les couteaux, elle les lance, et Hanna au milieu de la cible, ne tremble pas. Hanna et la Vieille ont des rapports heurtés, mais on est bouleversé de les voir ainsi s’aimer plus qu’ailleurs on ne le vit jamais. Et quand elle est tombée, s’est relevée, a relancé couteaux et autres fourchettes, elle n’est plus là, elle s’envole en laissant Hanna recevoir son héritage, elle s’envole dans un dernier rappel du mal que font les pierres qu’on a toujours dressées contre elle et les manouches. 

Martin Petitguyot, génial   

Le Fils, la Vieille, ce qu’ils disent dans leur spectacle de théâtre forain, c’est Martin Petitguyot tout seul. Texte, mise en scène, jeu, il fait tout mais jamais, jamais, on ne se croit au spectacle. Grâce à un jeu d’une authenticité, d’une vérité à couper le souffle, d’une diction qui fait des mots des couteaux qui transpercent l’âme, Martin justifie toute l’aventure manouche, tout le scandale de l’"autre" toujours chassé parce que différent, fait ressurgir les fantômes des camps qui ont pu exister du côté de Moloy.
 
Et nous, qui venons de vivre dans ces familles, nous avons envie d’embrasser Hanna (Emma Ader, stupéfiante) et de chanter avec elle une de ses complaintes. Spectacle, puisqu’il faut bien employer le mot, qu’on regarde le souffle coupé, qu’on vit de l’intérieur, qui vous retourne et justifie toute l’aventure dramatique !

Trouvez la roulotte d’Amaranta : vous ne l’oublierez jamais.


Michel HUVET


mercredi 24 mai 2017

LÉGISLATIVES CÔTE-D'OR : LE CHAMBOULE-TOUT




Coup  de balai, oui, et quel ! Depuis la bourrasque de la fantastique chevauchée macronienne — une start-up affolante que j’avais annoncée dès décembre —, on ne peut que constater la ringardise qui affuble désormais les vieux partis, boursouflés, anéantis, hoquetant, dont les patrons se ridiculisent encore plus en donnant des consignes dont tous leurs membres se contrefichent. Un vent curieux s’est levé, qui emporte tout sur son passage.

Et voici que s’annoncent les élections législatives. Et que le charivari national s’installe en Côte-d’Or. Personne ne s’y retrouve, et des guerres fratricides ont été déclarées, qui ne veulent pas dire leur nom mais qui fragilisent encore plus les bastions et ceux qui y font le guet. La municipalité dijonnaise elle-même en perd un latin qu’elle avait mis si longtemps à imposer (l’union) et l’on voit des adjoints au maire se concurrencer dans les circonsriptions, bref une pagaille qui ne pourra que laisser de vilaines traces une fois terminée la partie de poker menteur.

1ère circonsription 

 C’est une pétaudière. Une récente émission de France 3 Bourgogne (en lien avec Le Bien Public et son très serein et talentueux Bertrand Lhote) a révélé ce chaos politique : François-Xavier Fugourd (candidat « libre » ex-LR et doté d’un suppléant ex-UDI façon Macron) s’abritant astucieusement derrière le député sortant PS Laurent Grandguillaume pour dénier à Anne Erschens (LR) sa légitimité territoriale sous les regards en chiens de faïence de deux adjoints « macroniens » de François Rebsamen, l’inattendu Didier Martin (ex-PRG) et la très astucieuse Sladana Zivkovic (PS + En marche grâce à son suppléant). On ne peut pas faire pire dans l’imbroglio. Ça va, vous vous y retrouvez ?

2° circonscription

C’est un peu plus simple. Quoique. Il eut été naturel que le député sortant Remi Delatte parte vers sa réélection en prenant Anne Eerschens pour suppléante, mais non, il a envoyé cette dernière sur la 1ère. Du coup, son suppléant sera le président des maires de Côte-d’Or, Ludovic Rochette, conseiller départemental de surcroît. L’affrontement se fera avec Pierre Pribetich, adjoint PS de Dijon et ancien député européen, sans oublier que là encore, les macroniens de Danièle Juban (autre adjointe au maire de Dijon) y ont investi un candidat (François Desseille, autre adjoint de Dijon) qui fait qu’on n’y comprend plus rien. Et qu’on se demande si François Rebsamen n’est pas, cette fois, complètement dépassé.

3° circonscription

La belle circonscription reste marquée par les mandats de Roland Carraz. Et là, on avait jusqu’ici Kheira Bouziane (PS, façon frondeuse) qui a très bien travaillé au Palais Bourbon et dont on ne voit pas pourquoi elle n’aurait pas eu le droit de continuer. Mais non. Pour contrer la LR Pascale Caravel — qui avait, il y a cinq ans, failli l’emporter comme Lucien Brenot l’avait fait en 1993 —,  revoilà la bousculade. Une autre adjointe au maire de Dijon ( !), Anne Dillenseger, est investie par le PS pour damer le pion de Kheira Bouziane, mais ce n’est pas tout et il ne faut pas oublier les marcheurs, et donc Fadila Khattabi, inconnue qui ne tardera pas à accéder à la notoriété tant son tempérament a l’air conquérant ! Sans oublier, ici, le candidat mélanchonien et bien nommé Boris Obama qui saura faire fructifier les scores du premier tour de la présidentielle. Vous suivez toujours ?

4° circonscription

Celle-là est une des plus grosses de France (343 communes, 17 anciens cantons) et avait été offerte sur un plateau d’argent en 1993 à François Sauvadet par Gilbert Mathieu. En jachère depuis la démission d’icelui en 2016, elle aspire à un vrai défenseur de son territoire rural et elle l’a trouvé en la personne du maire de Châtillon-sur-Seine, Hubert Brigand, vice-président du conseil départemental et qui a mis cette « ruralité en avant » pour bien montrer qu’au-delà des partis, l’intérêt du territoire est primordial. Investi par LR au plan départemental, Hubert Brigand s’est vu non investi par les chères élites parisiennes au profit du sous-lieutenant de l’ancien député, le dijonnais Charles Barrière, qui a une pharmacie à Is-sur-Tille. Et pan sur le bec ! Face à eux deux, l’incontournable maire de Venarey, Patrick Molinoz, par ailleurs vice-président du conseil régional, qui est investi par le PS mais ne cache pas son attirance macronienne, même si les marcheurs lui opposent ici Yolande de Courson maire d’Arrans (avec un suppléant venu du PRG !). Cela fait d’autant plus de monde que la gauche a estampillé des candidats du PCF, de FI ou de NPA et des Verts, sans oublier que là aussi Marine-qui-prie-à-Reims a investi Sylvie Beaulieu. Vous n’avez pas trop le tournis ?

5° circonscription

On dira que celle-là est celle de la sagesse. Sentant bien que la ringardisation ambiante, ajoutée à la déliquescence partisane autant qu’à l’usure aggravée, ne lui serait pas forcément favorable, le maire de Beaune Alain Suguenot a décidé de garder sa mairie plutôt que de retourner sur les bancs de la future Assemblée nationale. Du coup, c’est son suppléant Hubert Poullot qui se lance pour LR avec … Alain Suguenot comme suppléant. Subtil, non ? La bataille sera rehaussée par la présence, au nom des marcheurs macroniens, de l’ancien sous-préfet Didier Paris, sans oublier que tous les partis ont investi ici un candidat, FN, PS, FI, Verts, etc. Ouf, on a enfin fait le tour !

Sauf qu’il ne faut pas oublier également que, pour que les candidats figurent au second tour, il leur faudra atteindre au moins 12, 5% des inscrits, ce qui, au vu nombre de candidats, ne garantit aucunement une triangulaire voire un duel ! Et même s’ils ont lieu, gare aux reports de voix qui risquent parfois d’être assez inattendus !


Michel HUVET



mardi 16 mai 2017

QUATUOR MANFRED : SUR LE TOIT DU MONDE MUSICAL


 
Photo X
J’ai déjà, ici, raconté comment le Quatuor Manfred avait désormais atteint la cîme de l’excellence. Il fallait sans doute ce 30° anniversaire pour que soit atteinte l’autre cîme, l’inatteignable perfection émotionnelle. Eh ! bien c’est fait depuis samedi dernier à Dijon, dans cette salle du Temple réformé – qui sonne juste, sans plus mais pas moins – où les quatre artistes aux cheveux blanchis ont retrouvé une jeunesse folle en jouant Schumann, Brahms et Tchaïkovsky.

Rarement, quasiment jamais – j’ai réécouté mes vieux CD ! – je n’avais entendu le Quatuor n°2 de Brahms comme nous avons pu l’entendre le 13 mai. Jamais. Pas même les quatre solistes du Quatuor qui ont avoué, après le concert, qu’il s’était effectivement "passé quelque chose" ! Ce qui me paraissait comme ennyeux chez Brahms m’est soudain apparu plein de sens, émouvant, passionnant, à l’instar de cet andante moderato à faire couler nos larmes sous les accents déchirants que noie une mélodie schubertienne sous un chromatisme métaphysique !

Et puis, voilà que Tchaïkovsky est appelé en renfort. On connaît mal le musique de chambre de ce géant chorégraphique mort trop tôt pour avoir bu de l’eau non potable. Avec le 2° Quatuor (fa majeur), on embarque pour la modernité la plus invraisemblable, l’atonalité même, et surtout des confidences de l’âme qui nous éloignent de toute référence au Lac des Cygnes voire à Eugène Onéguine. Non, ici, c’est le violon solo qui tente maintes fois de supplier le Ciel sous les flèches acérées qui le déchirent en variations inouïes.

Trente ans ! Les Manfred auront mis trente ans pour en arriver là, et c’est bouleversant.
 
Michel HUVET


lundi 8 mai 2017

CHOEUR DE HAUTE-CÔTE-D'OR : UN GRAND CHEF ET UN SACRÉ ROSSINI !




Les mélomanes de haute Côte-d’Or ont eu la chance, deux fois dans une église (Semur collégiale et Montbard Saint-Urse) et une fois dans un théâtre (Châtillon-sur-Seine) d’entendre cette merveille indéfinissable, aussi liturgique que cocasse, aussi opératique que chambriste, qu’est la Petite messe sollennelle de ce diable de Rossini.

Les interprètes étaient des solistes et instrumentistes de haut vol (la plupart venus de la Maîtrise de Radio-France) entourés de ce chœur dit « de Haute-Côte-d’Or » qui ne cesse de grandir, d’étonner, de susciter louanges et que dirige aujourd’hui un très grand professionnel qui a le bonheur de posséder une résidence secondaire en terre d’Époisses, Jean-Christophe Hurtaud.

Dans ce théâtre châtillonnais où l’acoutique s’est révélée impeccable – elle est d’une finesse certes un peu sèche et ne pardonnant aucun défaut mais somptueusement agréable tant pour les artistes que pour le public –, cette œuvre « pied-de-nez » de l’auteur du Barbier de Séville a pris les couleurs d’une incroyable modernité. Cela est dû au chef, bien sûr, mais aussi au fait qu’il avait avec lui une pianiste très percutante comme Alberta Alexandrescu et surtout au fait qu’il avait remplacé le traditionnel harmonium par un accordéon diatonique (Michel Glasko), ce qui a ajouté comme un goût citronné aux tuttis délicats du chœur.

 Rossini et les chemins de traverse

On est ainsi passé par bien des chemins de traverse avec le signor Rossini : d’un kyrie tout en mélodismes doux-amers à un Gloria aux arias subtilement angéliques (tel le duo soprano-mezzo du Qui tollis) puis à un Credo démentiel où la foi se déclare en accents graves où se mêlent aussi bien Bach que Haydn, Mozart que Cherubini. Puis après un Amen gros comme un orage d’été, on enchaîna avec  un Sanctus éminemment serein avant un O salutaris chanté par la soprano (Claudine Margely) comme une très émouvante prière, pour conclure par un Agnus où se retrouvent mêlés tous les chemins empruntés depuis le début, avec des rimes sarcastiques au milieu des ineffables chœurs chantournés soutenant des solis puissants (1)et des promesses d’accords parfaits. Magique !

On a hâte de demander à Jean-Christope Hurtaud de revenir vite sur ces terres avec des œuvres nouvelles et ce Chœur de Haute-Côte-d’Or qui, quand il sera renforcé en ténors et alti, et qu’il travaillera vocalement encore plus qu’il ne le fait,  pourra sans crainte soutenir la comparaison avec les plus illustres.

Michel HUVET


(1) N’oublions pas, outre ceux déjà cités, les taments de Brigitte Vinson, mezzo, et Marc Pansek, basse

vendredi 7 avril 2017

LEGISLATIVES CÔTE-D'OR : LES PARTIS N'ONT PLUS LA COTE


En Côte-d’Or comme ailleurs, on prépare les législatives. Chaque futur candidat est prêt, s’est lancé déjà ou se lance, à l’instar de Hubert Brigand qui déplace les foules dans la iV° sous la bannière de « La ruralité en avant ». Place, d’ailleurs, aux nouveaux candidats, pas aux anciens qui ont accumulé autant d’avantages qu’ils ont montré leur inefficacité.


Mais s’il est une réalité que ce futur remue-ménage annonce bien, c’est que les partis dits traditionnels sont morts ou à l’agonie : plus personne ne les écoute et eux-mêmes sont tiraillés au sein même de leurs échopes. Alors, on rirait presque de les voir s’agiter, de désigner des candidats, de s’offusquer que d’autres les désavouent, de s’agiter comme des mouches un soir d’orage, de tempêter ou d’exclure, d’adouber ou de refuser. C’en serait presque comique si leur aveuglement n’était aussi pathétique, et donc dramatique pour la démocratie. Regardez un peu ici où là, vous comprendrez vite.

Exemples dans la III° et la Ière ...

Kheira Bouzhiane (Photo X)
Tiens, la III° circonsription : le PS adoube Anne Dillenseger mais Kheira Bouziane, sortante PS, entend bien ne pas se laisser faire et maintient d’autant plus sa candidature qu’en bonne frondeuse elle vient de piquer son suppléant à la candidate de droite, Pascale Caravel, en l’occurrence le maire de Rouvres et président de la communauté de communes !

François-Xavier Dugourd (Photo X)
Tiens, la Ière : LR adoube Anne Eerschens – qui vient de la II° mais est labellisée Delatte et ne désobéit donc point – alors que François-Xavier Dugourd est, si l’on ose dire, le candidat légitime de la droite, même si Bernard Depierre l’est tout autant et doit bien s’amuser à jouer les revenants ! En même temps, c’est un UDI qui en veut tout autant : pourquoi et au nom de quoi Ludovic Bonnot ne pourrait être candidat, lui qui accumule les bons exemples de ce que devrait faire tout élu ?
Marie-Claude Posière (Photo X)

Et dans la IV°

Tiens la IV° : LR national adoube l’UDI Charles Barrière mais LR Local adoube Hubert Brigand ! Et le maire de Châtillon, qui « travaille » le terrain depuis fort longtemps et s’est mis en campagne depuis bien avant que la circonscription ne soit laissée en jachère par l’ancien député, entend bien aller « au bout » de son combat, laissant râler les élus inféodés au président du conseil départemental – pour qui il a fait campagne 13 fois en 20 ans ! – et d’abord ceux des Tilles et de la Seine qui ne digèrent pas qu’il ait choisi comme supplénate la mairesse de Villotte-Saint-Seine, Marie-Claude Posière,qui n’a pas la langue dans sa poche.

On pourrait multiplier les exemples. La voix des partis est devenue inaudible. On se déchire trop en leur sein. Ils ont perdu tout crédit. Tout comme la V° République, d’ailleurs, vaincue par la médiocrité et l’impuissance de petits marquis qui ont longtemps eu l’illusion qu’une élection les rendait intelligents. La réalité les a rattrapés et le peuple leur demande des comptes.


Michel HUVET






mercredi 29 mars 2017

JEAN VIGREUX, LE MORVAN ET MITTERRAND : C.Q.F.D.


 Si l’Histoire est une science, elle n’échappe quand même pas à la vie personnelle de l’historien. Jean Vigreux, professeur d’Histoire contemporaine à l’Université de Bourgogne, spécialiste de l’histoire du communisme rural et de la politisation des campagnes, n’en est pas moins aussi le fils d’un célèbre historien nivernais (Marcel Vigreux) et il a accroché bien de ses souvenirs d’enfance aux branches des sapins qui entourent Château-Chinon ou Dun-les-Places.

Voilà pourquoi ce petit livre qui vient de paraître aux Editions Universitaires de Dijon : François Mitterrand, la Nièvre et le Morvan (1) n’est pas comme les autres. Bien sûr, l’ouvrage est d’une extrême rigueur historique et chaque élection est passée au crible des vérifications, des chiffres et des noms. Mais cet ouvrage historique est aussi un ouvrage philosophique : Jean Vigreux, en épluchant la vie politique de la Nièvre entre 1947 et 1996, va beaucoup plus loin. Il nous fait pénétrer en fait dans les rapports affectifs qu’a pu entrentenir avec ce département et ce territoire morvandiau un homme politique comme François Mitterrand et qui dépassent de loin les seuls intérêts politico-électoraux.

Une sensibilité particulière

Mitterrand, en effet, s’est totalement “identifié” à sa terre d’élection. En 1995, encore président de la République, il disait : "Tout s’est bien passé entre les Nivernais et moi-même. J’en garde une sorte de sensibilité particulière. Lorsque je rencontre les Nivernais, cela me procure toujours un plaisir un peu différent de celui que j’éprouve avec d’autres”. Et Jean Vigreux ira jusqu’à nous raconter comment le grand homme d’Etat avait acheté secrètement un carré d’herbe au sommet du mont Beuvray pour y être enterré “comme un vieux Gaulois".

Bien sûr, l’apport de Mitterrand à la Nièvre est capital : désenclavement, routes, "ardoises d’Anjou" sur les toîts des vieilles maisons rénovées, usines, circuit automobile, musée du Septennat, on en passe et des meilleurs. Reste surtout cette incroyable affinité entre l’homme d’Etat et les "braves morvandiaux", à commencer par Camille Marchand, le sabotier maire de Gouloux, qui a reçu des milliers de cartes postales de Mitterand, où qu’il soit allé, comme chef de l’Etat, dans le monde.
 
Un petit livre d’historien qui vaut qu’on le dévore : pour avoir moi-même bien connu tous ces personnages nivernais, y compris la famille Gouze ou la maison de Camille Marchand, j’ai goûté cet essai avec gourmandise car elle m’a enrichi d’autant d’Histoire que de nostalgie…

Michel HUVET

(1) François Mitterrand, la Nièvre et le Morvan, par Jean Vigreux
(Editions EUD, coll. Essais, 130 pages, 9 €


lundi 20 mars 2017

GRANGE DU PRIEURÉ DE VITTEAUX : "IL S'EST PASSÉ QUELQUECHOSE D'INCROYABLE"


(Photo Annie-Paule de Prinsac)
 Que ce soit à Vitteaux, dans une grange comme celle que font vire musicalement Martine et Jean-Louis Chastaing, et non pas à Salzbourg, à Vienne, à Paris ou à Berlin, que l’on a pu entendre, deux ans de suite, des musiciens exceptionnels comme Alain Meunier, Janina Baechle et Anne Le Bozec, paraîtra toujours incroyable, invraisemblable, aux yeux des mémomanes volontiers incrédules.

On se pince, on boit un verre de crémant en la compagnie des artistes après le concert, on se dit qu’on n’a pas rêvé. C’est pourtant bien dans un rêve métaphysique, dans un temps suspendu façon Proust, dans une ambiance de pure éternité, qu’on a entendu deux soirs de suite le violoncelliste, la pianiste et la cantatrice proposer un parcours dans l’ineffable, dans la pure beauté, dans un printemps quasiment éternel.

Eux-mêmes, les artistes, n’en sont pas revenus. « Il s’est passé quelque chose d’incroyable, jamais on n’a joué comme ça » disait Anne Le Bozec après le concert. Et c’est vrai, qu’à l’issue des quatre lieder de Henri Duparc – mais surtout l’Extase –, on était ailleurs, dans un climat surréel : jamais on n’avait entendu piano et voix s’entrelacer de la sorte dans ces mélodies élévatrices que Janina et Anne ont interpétées dans un même souffle, avec des pianissimi à s’évanouir. Ayant fini, elles n’ont pu, toutes les deux, que tomber dans les bras l’une de l’autre.

Chopin et le violoncelle

La veille au soir, dans un climat certes très différent, un autre sommet fut atteint. Alain Meunier et Anne Le Bozec ont gravi un sommet, et nous l’ont fait gravir avec eux. L’incompréhensible – et du coup très peu jouée – Sonate pour violoncelle et piano de Frédéric Chopin, a trouvé en eux, dans cette grange et ce soir-là, tout son sens et sa gravité. En tout cas, avec ce violoncelle très moderne aux plus fortes couleurs de l’arc-en-ciel, avec cette pianiste qui a les doigts de Chopin, voilà quatre mouvements qui nous ont embarqué dans une sorte de poésie testamentaire (l’andante surtout) dont la modernité musicale est soudain apparue avec une netteté confondante.

Faudrait-il dire aussi l’émotion qui a étreint l’assistance si nombreuse quand on a entendu, par les mêmes artistes complètement transcendés, dans les cinq Rückert-Lieder de Mahler (on est hors de l’espace-temps avec l’aveu de Mahler qu’il « est perdu pour le monde ») la voix de Janina Baechle fendre le ciel et tutoyer quelques anges ? Faudrait-il dire enfin la découverte du génie de Zemlinsky dans sa Sonate pour violoncelle et piano et combien nous n’avions jamais su entendre comment Brahms savait apaiser tous nos désirs (lied Gestillte Sehnsucht) ?

Pour redescendre dans notre triste terre, les artistes ont su conclure par de jolis sourires, tels que des bis façon Poulenc – les Chemins de l’amour ont été interprétes en hommage à Jean-Louis et Martine Chastaing – ou ce très intattendu et souriant Madrigal de Granados.

Michel HUVET

vendredi 27 janvier 2017

SAINT-SEINE : LE RETOUR DES NUITS DE L'ABBAYE


Le 24 juin prochain, on ne sait pas qui sera président de la République ni qui seront les députés de la Côte-d’Or, et au fond peu importe : Saint-Seine l’Abbaye et son grand canton entendent bien renouer avec leur trésor musical, les Nuits de l’Abbaye, festival d’art vocal né en 2013 par la grâce de la conseillère départementale et maire de Val Suzon (Catherine Louis) et surtout de deux artistes exceptionnels, Claude Bazenet-Stochl la pianiste – résidente estivale de Saint-Seine – et le chef d’orchestre, compositeur et ténor Philippe Forget – le maestro de l’Opéra de Lyon –.

Plus de doute


Il y a eu, pour ce festival, un léger doute depuis deux ans : pas facile d’installer un lieu musical d’excellence en un lieu historique, certes, mais délaissé des grandes voies de communication estivales. Pourtant, personne en Côte-d’Or ou ailleurs, n’a oublié le Schubert du duo Florestan et encore moins l’œuvre spatio-temporelle de Philippe Forget, Specchio/Miroirs donnée avec le renfort des voix féminies de 4Anima. De tels artistes en résidence, puis en concert, c’est du « plus » pour un village historique et un regain d’intérêt pour une basilique peu commune et son histoire qui l’est encore moins.

Et parce qu’il y a, dans ce canton aux « forêts d’excellence », de quoi planter de beaux jalons pour l’avenir,  parce qu’il y a aussi des « bénévoles » qui offrent gîte, temps et sourire aux artistes invités – on pense au maire de Saint-Seine Daniel Malgras, au couple des docteurs Meyer, à Françoise Frochot et tant d’autres –, le festival des Nuits de l’Abbaye est reparti pour un sacré tour ! Ce sera donc les 24 et 24 juin prochain : trois concerts qui feront courir les foules, sur l’idée centrale qui va du Danube … à la Seine, avec Claude Bazenet et Elsa Cantor au piano, Philippe Cantor et Philippe Forget à la voix !

Exposition Ivan Stochl 

 D’ici là, il va s’agir de convier bien des mélomanes des environs côte-d’oriens à venir grossir les rangs des adhérents de l’association Florestan, il va s’agir de faire en sorte que personne ne traverse ni Val Suzon ni Saint-Seine sans remarquer qu’il y a là un festival hors normes, il va s’agir de trouver subventions et sponsors, il va surtout s’agir de rameuter touristes et résidents de toute la Bourgogne pour que ces Nuits de l’Abbaye soient enfin complètement réussies.

À l’heure de la fête de la musique et de l’arrivée de l’été, l’Office de Tourisme de Saint-Seine vaudra qu’on s’y arrête : pour y trouver bien sûr tous les renseignements sur le festival, mais aussi pour admirer, contempler, voire acquérir une des œuvres picturales d’Ivan Stochl – le célèbre clarinettiste, oui, oui ! – qui sont elles aussi une forme de réponse aux modes intemporels de la musique de Philippe Forget.

Plus personne, désormais, n’aura d’excuse pour éviter Saint-Seine fin juin prochain !


Michel HUVET