mercredi 24 mai 2017

LÉGISLATIVES CÔTE-D'OR : LE CHAMBOULE-TOUT




Coup  de balai, oui, et quel ! Depuis la bourrasque de la fantastique chevauchée macronienne — une start-up affolante que j’avais annoncée dès décembre —, on ne peut que constater la ringardise qui affuble désormais les vieux partis, boursouflés, anéantis, hoquetant, dont les patrons se ridiculisent encore plus en donnant des consignes dont tous leurs membres se contrefichent. Un vent curieux s’est levé, qui emporte tout sur son passage.

Et voici que s’annoncent les élections législatives. Et que le charivari national s’installe en Côte-d’Or. Personne ne s’y retrouve, et des guerres fratricides ont été déclarées, qui ne veulent pas dire leur nom mais qui fragilisent encore plus les bastions et ceux qui y font le guet. La municipalité dijonnaise elle-même en perd un latin qu’elle avait mis si longtemps à imposer (l’union) et l’on voit des adjoints au maire se concurrencer dans les circonsriptions, bref une pagaille qui ne pourra que laisser de vilaines traces une fois terminée la partie de poker menteur.

1ère circonsription 

 C’est une pétaudière. Une récente émission de France 3 Bourgogne (en lien avec Le Bien Public et son très serein et talentueux Bertrand Lhote) a révélé ce chaos politique : François-Xavier Fugourd (candidat « libre » ex-LR et doté d’un suppléant ex-UDI façon Macron) s’abritant astucieusement derrière le député sortant PS Laurent Grandguillaume pour dénier à Anne Erschens (LR) sa légitimité territoriale sous les regards en chiens de faïence de deux adjoints « macroniens » de François Rebsamen, l’inattendu Didier Martin (ex-PRG) et la très astucieuse Sladana Zivkovic (PS + En marche grâce à son suppléant). On ne peut pas faire pire dans l’imbroglio. Ça va, vous vous y retrouvez ?

2° circonscription

C’est un peu plus simple. Quoique. Il eut été naturel que le député sortant Remi Delatte parte vers sa réélection en prenant Anne Eerschens pour suppléante, mais non, il a envoyé cette dernière sur la 1ère. Du coup, son suppléant sera le président des maires de Côte-d’Or, Ludovic Rochette, conseiller départemental de surcroît. L’affrontement se fera avec Pierre Pribetich, adjoint PS de Dijon et ancien député européen, sans oublier que là encore, les macroniens de Danièle Juban (autre adjointe au maire de Dijon) y ont investi un candidat (François Desseille, autre adjoint de Dijon) qui fait qu’on n’y comprend plus rien. Et qu’on se demande si François Rebsamen n’est pas, cette fois, complètement dépassé.

3° circonscription

La belle circonscription reste marquée par les mandats de Roland Carraz. Et là, on avait jusqu’ici Kheira Bouziane (PS, façon frondeuse) qui a très bien travaillé au Palais Bourbon et dont on ne voit pas pourquoi elle n’aurait pas eu le droit de continuer. Mais non. Pour contrer la LR Pascale Caravel — qui avait, il y a cinq ans, failli l’emporter comme Lucien Brenot l’avait fait en 1993 —,  revoilà la bousculade. Une autre adjointe au maire de Dijon ( !), Anne Dillenseger, est investie par le PS pour damer le pion de Kheira Bouziane, mais ce n’est pas tout et il ne faut pas oublier les marcheurs, et donc Fadila Khattabi, inconnue qui ne tardera pas à accéder à la notoriété tant son tempérament a l’air conquérant ! Sans oublier, ici, le candidat mélanchonien et bien nommé Boris Obama qui saura faire fructifier les scores du premier tour de la présidentielle. Vous suivez toujours ?

4° circonscription

Celle-là est une des plus grosses de France (343 communes, 17 anciens cantons) et avait été offerte sur un plateau d’argent en 1993 à François Sauvadet par Gilbert Mathieu. En jachère depuis la démission d’icelui en 2016, elle aspire à un vrai défenseur de son territoire rural et elle l’a trouvé en la personne du maire de Châtillon-sur-Seine, Hubert Brigand, vice-président du conseil départemental et qui a mis cette « ruralité en avant » pour bien montrer qu’au-delà des partis, l’intérêt du territoire est primordial. Investi par LR au plan départemental, Hubert Brigand s’est vu non investi par les chères élites parisiennes au profit du sous-lieutenant de l’ancien député, le dijonnais Charles Barrière, qui a une pharmacie à Is-sur-Tille. Et pan sur le bec ! Face à eux deux, l’incontournable maire de Venarey, Patrick Molinoz, par ailleurs vice-président du conseil régional, qui est investi par le PS mais ne cache pas son attirance macronienne, même si les marcheurs lui opposent ici Yolande de Courson maire d’Arrans (avec un suppléant venu du PRG !). Cela fait d’autant plus de monde que la gauche a estampillé des candidats du PCF, de FI ou de NPA et des Verts, sans oublier que là aussi Marine-qui-prie-à-Reims a investi Sylvie Beaulieu. Vous n’avez pas trop le tournis ?

5° circonscription

On dira que celle-là est celle de la sagesse. Sentant bien que la ringardisation ambiante, ajoutée à la déliquescence partisane autant qu’à l’usure aggravée, ne lui serait pas forcément favorable, le maire de Beaune Alain Suguenot a décidé de garder sa mairie plutôt que de retourner sur les bancs de la future Assemblée nationale. Du coup, c’est son suppléant Hubert Poullot qui se lance pour LR avec … Alain Suguenot comme suppléant. Subtil, non ? La bataille sera rehaussée par la présence, au nom des marcheurs macroniens, de l’ancien sous-préfet Didier Paris, sans oublier que tous les partis ont investi ici un candidat, FN, PS, FI, Verts, etc. Ouf, on a enfin fait le tour !

Sauf qu’il ne faut pas oublier également que, pour que les candidats figurent au second tour, il leur faudra atteindre au moins 12, 5% des inscrits, ce qui, au vu nombre de candidats, ne garantit aucunement une triangulaire voire un duel ! Et même s’ils ont lieu, gare aux reports de voix qui risquent parfois d’être assez inattendus !


Michel HUVET



mardi 16 mai 2017

QUATUOR MANFRED : SUR LE TOIT DU MONDE MUSICAL


 
Photo X
J’ai déjà, ici, raconté comment le Quatuor Manfred avait désormais atteint la cîme de l’excellence. Il fallait sans doute ce 30° anniversaire pour que soit atteinte l’autre cîme, l’inatteignable perfection émotionnelle. Eh ! bien c’est fait depuis samedi dernier à Dijon, dans cette salle du Temple réformé – qui sonne juste, sans plus mais pas moins – où les quatre artistes aux cheveux blanchis ont retrouvé une jeunesse folle en jouant Schumann, Brahms et Tchaïkovsky.

Rarement, quasiment jamais – j’ai réécouté mes vieux CD ! – je n’avais entendu le Quatuor n°2 de Brahms comme nous avons pu l’entendre le 13 mai. Jamais. Pas même les quatre solistes du Quatuor qui ont avoué, après le concert, qu’il s’était effectivement "passé quelque chose" ! Ce qui me paraissait comme ennyeux chez Brahms m’est soudain apparu plein de sens, émouvant, passionnant, à l’instar de cet andante moderato à faire couler nos larmes sous les accents déchirants que noie une mélodie schubertienne sous un chromatisme métaphysique !

Et puis, voilà que Tchaïkovsky est appelé en renfort. On connaît mal le musique de chambre de ce géant chorégraphique mort trop tôt pour avoir bu de l’eau non potable. Avec le 2° Quatuor (fa majeur), on embarque pour la modernité la plus invraisemblable, l’atonalité même, et surtout des confidences de l’âme qui nous éloignent de toute référence au Lac des Cygnes voire à Eugène Onéguine. Non, ici, c’est le violon solo qui tente maintes fois de supplier le Ciel sous les flèches acérées qui le déchirent en variations inouïes.

Trente ans ! Les Manfred auront mis trente ans pour en arriver là, et c’est bouleversant.
 
Michel HUVET


lundi 8 mai 2017

CHOEUR DE HAUTE-CÔTE-D'OR : UN GRAND CHEF ET UN SACRÉ ROSSINI !




Les mélomanes de haute Côte-d’Or ont eu la chance, deux fois dans une église (Semur collégiale et Montbard Saint-Urse) et une fois dans un théâtre (Châtillon-sur-Seine) d’entendre cette merveille indéfinissable, aussi liturgique que cocasse, aussi opératique que chambriste, qu’est la Petite messe sollennelle de ce diable de Rossini.

Les interprètes étaient des solistes et instrumentistes de haut vol (la plupart venus de la Maîtrise de Radio-France) entourés de ce chœur dit « de Haute-Côte-d’Or » qui ne cesse de grandir, d’étonner, de susciter louanges et que dirige aujourd’hui un très grand professionnel qui a le bonheur de posséder une résidence secondaire en terre d’Époisses, Jean-Christophe Hurtaud.

Dans ce théâtre châtillonnais où l’acoutique s’est révélée impeccable – elle est d’une finesse certes un peu sèche et ne pardonnant aucun défaut mais somptueusement agréable tant pour les artistes que pour le public –, cette œuvre « pied-de-nez » de l’auteur du Barbier de Séville a pris les couleurs d’une incroyable modernité. Cela est dû au chef, bien sûr, mais aussi au fait qu’il avait avec lui une pianiste très percutante comme Alberta Alexandrescu et surtout au fait qu’il avait remplacé le traditionnel harmonium par un accordéon diatonique (Michel Glasko), ce qui a ajouté comme un goût citronné aux tuttis délicats du chœur.

 Rossini et les chemins de traverse

On est ainsi passé par bien des chemins de traverse avec le signor Rossini : d’un kyrie tout en mélodismes doux-amers à un Gloria aux arias subtilement angéliques (tel le duo soprano-mezzo du Qui tollis) puis à un Credo démentiel où la foi se déclare en accents graves où se mêlent aussi bien Bach que Haydn, Mozart que Cherubini. Puis après un Amen gros comme un orage d’été, on enchaîna avec  un Sanctus éminemment serein avant un O salutaris chanté par la soprano (Claudine Margely) comme une très émouvante prière, pour conclure par un Agnus où se retrouvent mêlés tous les chemins empruntés depuis le début, avec des rimes sarcastiques au milieu des ineffables chœurs chantournés soutenant des solis puissants (1)et des promesses d’accords parfaits. Magique !

On a hâte de demander à Jean-Christope Hurtaud de revenir vite sur ces terres avec des œuvres nouvelles et ce Chœur de Haute-Côte-d’Or qui, quand il sera renforcé en ténors et alti, et qu’il travaillera vocalement encore plus qu’il ne le fait,  pourra sans crainte soutenir la comparaison avec les plus illustres.

Michel HUVET


(1) N’oublions pas, outre ceux déjà cités, les taments de Brigitte Vinson, mezzo, et Marc Pansek, basse